" La vie de Pascal Depresle ressemble, à bien des égards, à un roman. Mais il aura fallu trente-quatre ans avant que l'auteur ne se décide à la raconter.
Avec ses trois premiers ouvrages, une trilogie poétique intitulée Le cri des autres, c'est ce parcours quelque peu chaotique que raconte l'auteur, entre hasards du destin et drames personnels.
Enfant précoce, le jeune Pascal est promis à un avenir des plus radieux. « J'avais des facilités qui m'ont amené à sauter deux classes. Mais j'étais flemmard à l'époque », dit-il. Flemmard, et un brin perdu. À quatorze ans, le gamin de Montluçon souffre de l'écart générationnel qui le sépare de ses camarades. « C'est particulier d'avoir des potes avec des voitures lorsqu'on n'a même pas l'âge d'avoir une mobylette.»
Pascal Depresle
05 Décembre 21 ·
La voilà donc, la vie !
Cette histoire qu'on respire à l'envers, ces moments où les
couleurs changent parfois mais ne sont jamais les bonnes.
Ou ne sont pas celles qu'il faut voir.
Ces drôles de chutes qui font que l'on retombe toujours du côté
de la confiture, quelle que soit la hauteur de la chute.
Quelle qu'en soit sa nature aussi.
Pas de la confiture.
Encore que ça reste encore à définir, que de savoir si la douleur est
plus forte si l'on est tartiné, à plat sur les carreaux vintage de
notre enfance de plus en plus froide, de fraise ou d'abricot.
Ou de mûre.
Pas de murs.
Parce que c'est aussi ça, la vie.
Ces moments passés à bâtir des murs, l'un après l'autre, quart de tour après quart de
tour, pour se retrouver à bout d'arguments, de
parpaings et de mortier, enfermé dans sa propre vie, avec ses
nouveaux murs à vivre, qu'il nous faudra peindre de quotidien,
puis décorer de sourires rouge sang découpés dans des tranches
de vie, des rires enfermés dans des bouteilles à jamais
condamnées, des je t'aime qui n'auront plus que pour écho les
moellons bruts, jamais crépis, de notre dernière prison sans
fenêtre.
Une fenêtre, j'en ai eu une, un jour.
Une sur cour, il y a un an et plus.
Elle était la vie.
Je ne lui ai jamais rien confié, elle n'avait pas de lumière, pas
d'écho, si ce n'étaient celui des cri des prostituées africaines qui se
disputaient l'emplacement de la place Sainte-Claire aux filles
venues de l'Est.
De l'Europe, pas de la France.
Au final, ça n'aurait d'ailleurs rien changé.
Oui, la revoilà, la vie.
Faite d'ombres encore plus ombres que leurs propres reflets, qui
se gâchent, qui se cachent, qui se refusent à penser qu'elles ont pu
dire je t'aime, alors que ces mots résonnent encore dans des éclats
cristallins de pierres et de draps au fond d'un jardinet de centre
ville, sur un guéridon de fer où tintaient deux coupes enlacées,
toutes bulles dehors, tandis que des oiseaux complices
commençaient à verser quelques larmes en souvenir d'un futur
qu'ils savaient déjà.
Cette vie dérangée un moment, rien qu'un seul.
Cette vie de sommeils et de petits matins cafés qui ne savaient pas
qu'ils n'étaient que des éphémères livrées en pâture à la nuit.
Puis gobés.
Puis oubliés volontaires, chemin des Dames qui ne demanderait
que le sang d'une seule victime.
D'un soldat pas même inconnu, ce n'est ni pour offrir, ni pour
décorer, Noël n'a pas besoin de sapin quand il pleure dans le cœur
des Hommes.
Toujours la vie.
Cette corrida qu'on ne dénonce pas, où chacun s'esquive quand d'autres se cachent
ou fuient. Sans doute parce que nous sommes tous un jour et le torero, costume de
paillettes, le matamore, celui qui met à mort, et le taureau, celui d'habits tâchés de
notre propre sang collant et chaud qu'on met à mort.
Oui, inestimable bien, le seul qu'on ne puisse échanger, ou alors à
le refuser d'un bloc, et s'en aller en un matin de printemps qui sent
le muguet, c'est pour l'image, aller fleurir de larmes ceux qui te
couvriront de fleurs dans un éclat de fer blindé.
Oui, la voilà donc, cette vie, cette histoire bonimenteuse qu'on
respire à l'envers.
Celle dont on ne mate jamais l'amor.
Qui retombe toujours du mauvais côté.
Même si c'est ta confiture préférée, et qu'elle te dit qu'elle t'aime.
( Photo Нетипичный Обормот )
Et si j'ai tant rêvé d'ailleurs
Qui ne sont jamais arrivés
Qui donc ici aura le cœur
De pouvoir me le reprocher
Je veux mettre ma vie sur vibreur
Puis la passer en mode avion
Pour que les cris
Et les peurs
Ne poussent plus dans mes saisons
Et si j'écris toujours autant
C'est pour graver mes souvenirs
Pour les offrir au premier vent
Venu m'apporter un sourire
Non je ne suis pas mendiant
Même si mes bras se tendent encore
D'avoir un reste de vivant
Pour sculpter en songes ton corps
Et si l'ont dit que c'en est trop
Et si l'on dit que c'est fini
Je prendrais le prochain bateau
Qui me mènera où tu ris
Il n'y a pas de plage vierge
Qui fasse peur à mon demain
J'irai jusqu'à brûler un cierge
Pour pouvoir caresser ta main.
© Pascal Depresle
-Publication du 22/07/2020-